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Ibuso Metallistic

Toutes les tendances, du rock dur au rock fort !

Dissection - Storm of the Lights Bane (1995)

                                   

DISSECTION - Storm Of The Light's Bane (© 1995 Nuclear Blast)

Pierre angulaire du black metal suédois, Dissection aura marqué les esprits grâce à deux albums, The Somberlain (1993) et Storm Of The Light's Bane (1995) qui contribueront largement à la renommée du genre et à sa pérennisation internationale. Aujourd'hui encore, Storm Of The Light's Bane est une influence majeure au sein de la sphère metal et jouit d'une réputation toujours aussi forte dans le cœur des amateurs de black metal, étant même particulièrement adulé en Indonésie et en Amérique du Sud. Culte.

Dissection est fondé par le chanteur/guitariste Jon Nodtveidt (influencé par Iron Maiden, Kreator, King Diamond, entres autres) et le bassiste Peter Palmdahl. C'est en 1989 à Strömstad. Après une série de démos et de E.Ps, le groupe sort un premier opus prometteur The Somberlain en 1993 et se fait remarquer d’emblée. Un excellent album, monument du genre, qui laisse présager un avenir radieux à la formation. Dissection devient rapidement un des piliers de la seconde vague du mouvement initié par les célèbres Venom, Bathory et Celtic Frost.

L'avenir du groupe sera effectivement radieux, mais aussi très mouvementé. Le sulfureux Jon Nodtveidt est un homme actif, initié et co-créateur du Misanthropic Luciferian Order (aujourd'hui connu sous le nom de Temple de la Lumière Noire), une des organisations liées à l'église d'Anton Lavey, mais aussi membre de la Légion Werewolf, célèbre gang suédois chargé de collecter des fonds afin d'aider les immigrés qui arrivent au pays (mouarf, elle est bonne non ?) . On conclut donc facilement que le garçon n'est pas à placer dans la liste "enfants de cœur", on se doute aussi de la suite logique des événements (à une certaine époque, chez les blackeux, c'était très tendance d'aller faire un tour derrière les barreaux)..
Jon Nodtveidt fut également journaliste spécialisé dans le Black metal pour le magasine Metal Zone.

En 1997, Jon Nodtveidt se rend complice du meurtre d'un homosexuel algérien (le carton plein) et est condamné à 8 ans de prison (10 ans pour l'auteur du coup de feu). Emprisonnement qui entraine la dissolution du groupe, au grand désarroi du public metal.
Inutile de revenir ici sur cette affaire qui a déjà fait couler beaucoup (trop) d'encre (qui va longtemps transformer les forums de discussions en champ de bataille). On se concentre sur la musique.

Jon Nodtveidt est libéré en 2004 , il reforme Dissection avec une nouvelle équipe et sort l'album Reinkaos (moins marquant que les deux premiers).
Il se suicide à l'arme à feu en août 2006 (en possession d'un grimoire d'Anton Lavey et entouré de bougies), juste après avoir annoncé la fin du groupe. Selon ses derniers mots, l'homme aurait accompli tout ce qu'il devait en ce bas monde.

Il est temps de parler de Storm of the Light's Bane, album que j'ai acquis influencé par de nombreuses chroniques pour le moins élogieuses. D'ailleurs à cette époque, c'est avec grande surprise que je découvre ce groupe, alors que je me fais une idée du black metal somme toute assez classique. Je m'attends donc à un déluge de sons stridents, placé sous le signe du grande n'importe quoi, à un bordel pas possible, à une production effroyable (la fameuse cuve à mazout chère à Ibuse !) proche de l'inécoutable. Je suis sur le cul (pour rester poli) dès les premières notes de At The Fathomless Depths. Comme le black metal est un style particulièrement ésotérique, il en est régulièrement réduit à ses côtés les plus primitifs, à des clichés (cela dit, que certains groupes aiment entretenir et alimenter), je m'attendais à tout sauf à quelque chose de si musical, mélodique, pénétrant, émotionnellement fort. Comme quoi juger sans connaitre c'est mal.

                                       

At The Fathomless Depths, cette introduction glaciale, ce son caverneux, ce travail magistral qui nous donne un rendu menaçant et glacial accompagné de lentes percussions qui semblent ouvrir une inquiétante cérémonie.

Dès son introduction, cet album écrase littéralement l'auditeur, sans violence, sans déluge de note, tout en ambiances pesantes, tout en finesse. La place est brutalement laissée à Night Blood, véritable premier morceau de l'album. Une baffe. Un roulement de batterie aux toms résonants éclaireur d'un riff puissant aux allures death/thrash. Du début à la fin, la puissance côtoie le sublime et l'on se concentre, on pénètre toujours plus (comme c'est délicat !) afin d'accrocher le moindre détail dans cette immensité musicale. Les riffs s'enchainent, magistraux, inspirés, rien n'est fade ou sans intérêt. Ici, aucun remplissage, c'est un plaisir constant. Et quand Jon Nodtveidt varie ses vocaux, c'est pour apporter toujours plus à un ensemble bluffant. Au dessus c'est le soleil.

La deuxième guitare fait échos dans des profondeurs qui nous plongent véritablement hors de toute réalité, hors du temps. Cet album hypnotise.

Jon Nodtveidt est un compositeur de génie. sa musique est nourrie de toute sa haine, de sa violence, de son obscurité habillement brassés avec des vibrations nourries de mélancolie, d'un côté très spirituel, introvertie mais aussi reliée à des ambiances nordiques, froides, qui rappellent quelques grands espaces signes de solitude et de désespoir mais qui restent merveilleux par leur la beauté du paysage. On s'imagine presque perdu dans la neige, au milieu d'une forêt, poursuivi par je ne sais quelle force invisible. Et d'un point de vue textuel, les écrits de Jon Nodtveidt sont globalement assez occultes et d'une force poétique sombres. Les textes se laissent facilement apprivoiser par un auditeur qui sera à la recherche de ses propres expériences et se laissera emporter dans les brumes de ses pensées les plus tristes.
Les passages apaisants en acoustique sonnent comme des renaissances, on sort du tourbillon morbide, de l'oppression, on entre dans la beauté éphémère des sons cristallins, le brouillard retombe. On agonise dans la tempête glaciale, les hurlements gutturaux résonnent à nouveaux, les guitares en harmonie virevoltent.

Loneliness in the embrace of you autumn night
The night that froze my cries
Deep into the woods glows a fading light
I sold my soul, cold as ice

 

                                     

Les trémolos typiquement Black metal de Unhallowed (morceau que j'aime particulièrement) font leur apparition suivi du thème principal qui est à tomber. Chaque pièce se transforme en merveille, toujours porté par ce travail exceptionnel à la guitare. Les solos sont particulièrement mélodiques et apportent une musicalité grandiose à défaut d'être un exemple de technicité. Un des points forts de l'album qui est, certes, techniquement d'un bon niveau, mais qui laisse toujours la mélodie et les atmosphères surmonter la puissance et la technicité.
Where Dead Angels Lie, la plus célèbre pièce de l'album s'empare de l'auditeur dès son introduction construite d'arpèges absolument sublimes. C'est ensuite, et ça devient une habitude, un déluge de riffs du plus bel effet dans lesquels la guitare chante sa propre complainte. Et que dire du solo, superbe, suivi du retour des arpèges et la douce immersion dans une sorte de profonde contemplation.

Troublant... Je suis écorché vif par la musique, l'écoute est adoucie l'instant de quelques secondes par les premières notes de Thorns Of Crimson Death, une réussite totale, que dire de plus. Dissection joue avec les sonorités, avec les nuances et ne propose jamais uniquement un mur de puissance, de distorsion lourde, préférant donner une dimension beaucoup plus réfléchie à l'ensemble. Soulreaper ôte ce qu'il nous reste de lumière et de joie de vivre.

Une conclusion au piano, No Dreams Breed In Breathless Sleep et l'on s'empare de ses dernières notes, sublimes. huit morceaux, huit chefs-d’œuvre, je m'en remets.. doucement...

Jon Nodtveidt aura laissé des traces (hum...humour de mauvais goût), Storm of the Light's Bane a souvent été imité, mais jamais (oh que non !) égalé, c'est pour cette raison qu'il restera ancré à jamais dans l'histoire du metal. Un album qui sera suûrement difficile d'accès à un public plus large mais dont je ne cesserai jamais d'encourager l'écoute. Si aujourd'hui de nombreux groupes se lancent dans une course effrénée à la technique, à la violence, à la provocation, à la rapidité, à celui qui aura la plus grosse, en somme, Dissection avait tout compris de ce que doit être le black metal.

Un des plus grands albums du genre.

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